Le juste prix

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Aurélie à la sortie de Vidien (Bulgarie), en route pour Timisoara (Roumanie).

Bobislav s’apprête à passer le Danube, frontière naturelle entre la Bulgarie et la Roumanie lorsqu’il aperçoit nos pouces à l’entrée du pont. À bord d’une camionnette tractant une remorque vide, il file (à 50 kilomètres/heure) en direction de l’Allemagne, où il prévoit d’acheter une voiture d’occasion. 


950 euros pour une Golf diesel modèle 1999. Il lui faudra cinq jours et 3000 kilomètres pour la rapatrier en Bulgarie. Un aller-retour qui lui coutera 350 euros de carburant. Il la revendra environ 1500 euros pour un bénéfice net de 200. Dans dix jours, il renouvellera l’opération avec une Ford.

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Un « leu », des « lei », la monnaie locale en Roumanie. Il en faut 4,3 en 214 pour obtenir 1€

« C’est la crise ici, il n’y a pas de travail. Alors je me débrouille comme je peux ». Déformation professionnelle – ou contextuelle – oblige, Bobby passe les quatre heures de notre transport en commun à jouer à « Combien ça coute ? ». Combien tu gagnes ? Le prix de ton loyer ? Le pain en France ? Une bière ? L’achat d’un appartement ? « Et en location ? » « Et ta caméra là, elle vaut combien ? »

Le niveau de vie en France est plus élevé, certes mais tout de même… Comment justifier qu’un seul de nos appareils photos vaille deux fois son salaire mensuel ?

Paradoxalement, il refuse avec véhémence le billet de 10 lev (5 €) que nous lui offrons – non pas en échange de la course mais parce qu’il sera inutile en Roumanie.

sandra-café-autorouteIl finit par céder bon gré mal gré avant de nous déposer (généreusement) en centre-ville de Timisoara. Après quatre heures passées dans son véhicule, nous avons les jambes qui fourmillent. Lui poursuivra sa route six heures encore. Ou plus, peu importe, il « ne compte même plus ».

S’il était né ailleurs, serait-il de ceux que François et Ludovic auraient interviewé pour leur Projet W ? Ces globetrotteurs professionnels avec qui nous partageons le dortoir de notre auberge de jeunesse font le tour du monde pour réaliser des portraits d’entrepreneurs français oeuvrant pour une économie plus sociale et solidaire. Avec eux, l’affinité est immédiate.

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Aurélie Streiff & Sandra Reinflet avec François Noël & Ludovic Novitch au Freeborn Hostel de Timisoara

Dans le jardinet du « Freeborn hostel », peuplé ce soir là d’un duo d’australiens, d’un roumain, d’une belgo-finlandaise, d’un germano-américain et d’un polonais contorsionniste, nous passons une nuit électrique entre coupe du monde, shot de Palinka et causeries enflammées. Et ça, ça n’a pas de prix. 

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